«Le quartier. Qu’est-ce que c’est qu’un quartier ? T’habites dans le quartier ? T’es du quartier ? T’as changé de quartier ? T’es dans quel quartier ? Ca a vraiment quelque chose d’amorphe, le quartier : une manière de paroisse ou, à strictement parler, le quart d’un arrondissement, le petit morceau de la ville dépendant d’un commissariat de police … Plus généralement ; la portion de la ville dans laquelle on ne se déplace facilement à pied ou, pour dire la même chose sous la forme d’une lapalissade, la partie de la ville dans laquelle on n’a pas besoin de s’y rendre, puisque précisément on y est.» G.PEREC - Espèces d’espaces.
Le quartier Rodrigues est constitué de plusieurs barres d’immeubles, chacune à 4 étages, encadrant un grand terrain de football, espace de vie central. Ce coeur d’îlot semble être l’élément vers lequel les regards se tournent du haut des balcons, comme la scène d’un amphithéâtre. Il serait donc interessant de démarrer chaque «apparition» en ce lieu de façon à être visible de tous et ainsi donner un repère, un ancrage. Espace ambivalent, à la fois ouvert et clos, il permet assurément aux habitants de se regrouper, d’échanger, de se distraire mais offre t-il la possibilité d’un ailleurs ?
Le quartier est un microcosme, organisé, hiérarchisé, enclavé. Et tout cela, ça «tient» à quoi ?
«Ce qui se passe vraiment, ce que nous vivons, le reste, tout le reste, où est-il ? Ce qui se passe chaque jour et qui revient chaque jour, le banal, le quotidien, l’évident, le commun, l’ordinaire, l’infra-ordinaire, le bruit de fond, l’habituel, comment en rendre compte, comment l’interroger, comment le décrire ?» (...)
«Nous dormons notre vie d’un sommeil sans rêves. Mais où est-elle notre vie ? Où est notre corps ? Où est notre espace ? Comment parler de ces choses communes, comment les traquer plutôt, comment les débusquer, les arracher à la gangue dans laquelle elles restent engluées, comment leur donner un sens, une langue : qu’elles parlent enfin de ce qui est, de ce que nous sommes.» G.PEREC - L’infra-ordinaire.
Pourquoi escalader les façades balconnées ? Pour changer de porte d’entrée afin de susciter le dialogue, de questionner, d’intriguer, parfois de déranger. Munie d’un sac à dos uniquement, il s’agira de grimper étage après étage, une journée entière, en laissant la rencontre impromptue se faire ou pas. Si interaction il y a, ce sera l’occasion de partager un thé (thermos dans le sac à dos), des mots, des pensées, des secrets. Parce que l’on «tient» tous à sa manière, le thème TENIR sera le fil des discussions. Chacune d’entre-elles sera enregistrée. Ce collectage de témoignages du quotidien sera utilisé par la compagnie comme archive et, sur accord avec les habitants, pourra servir lors de la création d’un évènement et/ou d’une exposition à l’issue du projet.
Tenir le cap / 20 avril 2016
" C'est toujours inattendu, croiser un regard à un balcon et être soudain dans la rencontre, puis quitter une personne inconnue encore une heure avant avec le sentiment que oui, oui ça peut tenir les choses ensemble dans ce fichu monde de grimper des balcons, mêmes ardus, et de s'ouvrir aux autres tant qu'on peut, tant qu'on tient... Merci à Annick et à ses petits enfants pour cette belle rencontre"
Camille Fauchier
Bien se tenir / 20 avril 2016
" Tenir sa prise, ne pas la laisser s'échapper. Bien se tenir c'est aussi respecter. Ne pas franchir sans y être inviter. Maintenir un dialoque bien inspiré. Ascension jusqu'au 4ème étage pour rencontrer Rassim 8 mois et ses parents."Camille Fauchier