" Les fusées / les idées / toujours plus haut / font une brèche / dans la caverne / vers l'inconnu. " Marc Tardieu – extrait du poème « Les fusées »
Comment aborder l'espace, l'inconnu, le vide, ce qu'on ne connait pas... Comment parler du vide dans la profusion ? Impossible. Partir du dénuement.
Une capsule égarée, posée là, résonnante, vibrante et trois cosmonautes, accrochés à leurs bulles-boules, globes de plastiques, les protégeant ou pas des attaques extérieures, petits mondes sonores sur la tête qui se teintent de leurs respirations, les contraignent parfois, seuls éléments technologiques, mais souvent défaillant.
Eux-donc humains « sous bulles » au mileu de l'inconnu mais entourés de leur public équipage, et pris avec eux, dans le même espace, par les sons, les vibrations et les évènements extérieurs. C'est là que cet espace, ces globes et ces couvertures de survie se mettent à vivre indépendamment, décalent, absorbent les émotions, créent de nouveaux espaces et une autre perception du temps.
Traverser ensemble des aventures, frôler les comètes, la mort, la peur, ressentir physiquement les mêmes tempêtes, les mêmes joies, les mêmes explosions salvatrices, se toucher, rire, se laisser ressentir.
Souffler après avoir retenu son souffle, faire une fête, être humains, là, petits et grands, vivants, complètement, perdus au milieu de nulle part, mais humains en somme, les uns contre les autres serrés, dans le même vaisseau.
Essayer de faire marcher ce qu'on ne comprend pas et peu à peu accepter que ce qu'on ne comprend pas peut nous amener ailleurs. Que c'est comme arriver dans un pays inconnu dont on ne connait ni les paysages, ni les rites, ni la langue et qu'on ne peut appréhender qu'en lâchant prise. Prendre un autre chemin, goûter le silence des mots, communiquer autrement.
Ne plus chercher à tout comprendre, accepter ses propres limites, libérer son imaginaire, ouvrir ses sens, partir enfin, décoller sur un accident peut-être mais ensemble. Parce qu'on l'aura vécu et éprouvé et qu'on aura eu envie d'y croire. Notre envie : le carburant.
Les fusées, c'est peut-être nous, quand nous nous laissons « partir », quand nous acceptons le risque de nous perdre ou de nous trouver...
Céline Garnavault